REQUIEM À MAMAN II – MAMAN DIS-MOI, DIEU EST AVEC TOI ?
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RÉQUIEM À MAMAN
2013-2025
« La mort révèle l’amour, c’est l’inconsolable qui pleure l’irremplaçable »
Vladimir JANKÉLÉVITCH
« La patrie est là où l’on nous aime »
Mikhaïl LERMONTOV
I
Maman,
Ici-bas, je survis et je ne me laisse pas abattre.
Le néant dont parlent les philosophes, je l’ai vécu le 18 octobre 2013
Ce néant ne fut pas l’élucubration de la pensée qui se complait
À faire des phrases sophistiques pour parloter
Sur les articulations de l’inconnu
Sans le vivre ni le connaitre dans l’ici et maintenant.
Quand par cinq spasmes respiratoires
qui ont fait sauter ton corps squelettique du lit dur et froid
De cet hôpital du 20 de Paris.
Je ne comprenais pas
Que c’était la Mort qui t’arrachait de moi…
Tes yeux avec un regard d’épouvante
Les miens effrayés, obligés à te regarder pour la dernière fois.
Non, je ne le croyais pas
J’ai vu, senti et touché le néant
Un vide blanchâtre m’aspirait
Un vide blanchâtre qui insondable m’obligeait à tomber
Et à le suivre.
La lutte contre le Néant
m’échappait
Ton corps exsangue
Tes bras pendants
je t’ai fermé tes yeux
Je t’embrassais désespérée d’horreur
Sans me détacher de toi
J’aurais voulu
Qu’on m’enferme dans le même cercueil avec toi
Un binôme
Toitures les deux jamais séparées
D’avant la naissance jusqu’à la même tombe.
II
Tes yeux d’un regard qui ne changeait jamais
De son éternelle lumière de pure tendresse
Tes yeux qui ne me regarderaient plus jamais
avec ton océan de tendresse
De mère belle et sublime
J’ai toujours dit comme tout le monde
Que tu étais d’une beauté sublime
Les gens disaient de toi :
« Votre mère est d ‘une beauté émouvante »
III
Elles m’ont dit
Qu’embrassée à toi
J’ai hurlé
Pleuré
Pendant une heure sans arrêt.
Je n’ai plus de larmes
Depuis, je ne pleure plus jamais
Rien ne me fait pleurer.
Elles me laissèrent pleurer attachée à toi plus d’une heure
Sans arrêt
Dans l’hôpital, c’est moi qui a dû courir annoncer ta mort
C’était un vendredi à 12.50
Dans un instant tout le personnel s’est sauvé de l’étage
Comme des rats
Effrayées de voir
Que leur projet diabolique
Avait eu son effet.
Ta Mort atroce
Par « Le Sicaire « avait été si bien programmée
avait donné son résultat
Elles laissèrent vide instantanément l’étage
Et allèrent se cacher comme des rats.
IV
Jusqu’à ce qu’une petite aide-soignante voilée
Arriva avec une tasse de thé
Et m’a dit :
« Je sais ce que vous devez supporter ici… »
« Je sais tout ce que vous devez subir dans cet hôpital «
Pour me dire ensuite qu’on allait t’enlever
et que devait boire parce que j’étais déshydratée
Je ne voulais pas
Elle m’a dit :
Vous ne pouvez-pas rester comme ça
On vous a laissé pleurer. »
À la porte hermétique fermée
De la chambre de la douleur
Où toutes seules toi et moi, Maman
Étions enfermées sans personne
Dans la chambre de la douleur
Tu te nécrosais à vif
De l’intérieur vers l’extérieur
Moi, je devenais une autre femme
Ma voie sans toi serait jusqu’à ma mort
une route gelée et escarpée.
Ils avaient programmé
sous les ordres du « Docteur Traître-Tant »
Une agonie terrible sans sédatifs
Sans sédatifs
San personne médicale
Qui ne te vienne en aide
Pour soulager ton agonie atroce
L’indicible douleur
Consommait toi corps
Ton âme
Ton clavecin bien tempéré
Ne briserait plus jamais le silence qui t’attendait
Tes modulations du contrepoint
Comme personne ne l’a jamais joué.
Et, la Mort dans ses griffes
T’arrachait de moi
Elle nous soumettait toutes les deux
dans la même terrible douleur.
V
« Une grande force vous sera nécessaire.
Vous devez vous occuper seule de l’enterrement… »
Je suis rentrée pour la première fois de ma vie
Seule
dans « Le Taudis »
De retour pour la première fois, je rentrais seule
Et toutes tes affaires étaient là
Elles attendaient tout retour
Je suis rentrée seule
Ils t’emmenèrent à l’horreur
C’est ce qu’ils appellent
« La chambre froide »
Je suis rentrée seule dans une chambre vide
Je me cognais contre les meubles…
La douleur m’obligea à me cogner contre les murs
Car je ne comprenais pas
Je ne le croyais pas.
Mais la vérité est que je le savais très bien
Qu’une nouvelle vie m’attendait
C’est pourquoi
Le corps s’exprime
Se cogne
Se frappe
Contre tout ce qu’il trouve à son passage
Les yeux inondés de pleurs
Les hurlements crient le refus de la mort.
Parce que nous le savons bien
Que c’est l’irréversible
Dans l’ici-bas l’insondable mystère de l’horreur se dévoile
Ce que la pensée se refuse de croire
Le mot jamais prend toute sa place.
Programmer ton enterrement fut l’expérience de la seconde étape de l’horreur.
Si notre pharmacien ne m’avait pas fait le prêt
J’aurais succombé
Je suis arrivée vers lui en pleurs
Je ne veux pas m’humilier devant personne
Je lui ai dit
Je n’ai pas d’argent…
Il a sorti sa carte bleue et m’a fait un prêt instantanément
Il a appelé les pompes funèbres et il m’a payé l’enterrement
J’ai dû aussi compléter et vendre mon violon
Mon professeur de violon a fait les arrangements
pour que notre luthier le prenne
avec la ferme promesse que j’irais le récupérer.
Dès qu’ils viendraient
À mon secours des jours meilleurs.
Mais Maman,
Tu sais qu’en France
Pour ta fille
Il n’y a jamais eu,
il n’y a pas
Et, il n’y aura jamais « des jours meilleurs »
Parce que la méchanceté et plus forte que la bonté.
La jalousie est plus puissante que l’humilité.
Le sadisme ne laisse pas d’espace
À l’accueil de celui qui ne fait pas de mal à personne.
VI
L’argent est en France intimement liée à la Mort
J’ai dû payer un enterrement « low cost »
La mairie de Paris a inventé la modalité en anglais
Il paraît que l’ignominie passe mieux avec un accent étranger
Cercueil de la pire qualité
Et pour les pauvres
Non, dans notre cas « pour celle qui appauvries de force par la France
Tu ne méritais que
Le pire des emplacements au fond du cimeterre
Là-bas très loin, en pleine terre
Tu le sais, moi, je le sais, set au Chili aussi, ils savent
que nous n’avons jamais été « pauvres »
Mais la France, elle est heureuse
De nous avoir distribué une nouvelle « classe sociale »
À laquelle nous n’avons jamais appartenues
Ah ! la France se complait avec sadisme
De rabaisser
d’humilier
De vouloir arracher
jusqu’au dernier vestige de nos vertus
Une fois qu’elle a accompli son œuvre de tout détruire
Elle, ils, elles observent avec leur perspective ruineuse
Les effets dévastateurs de son œuvre de destruction
Je les observe me regarder d’un clin d’œil
leurs yeux débordants de jalousie
Un rictus serré dans le coin de leurs gueules morbides
Elles savent que nos vertus
Restèrent intactes
Parfaitement sauvegardées
En repli dans les caisses vides d’argent
Hermétiques aux attaques
nous sauvegardâmes notre dignité
faisant face silencieusement
À la grandiose lâcheté française
D’une administration morbide.
VI
Une grande fosse ouverte de terre fangeuse
T’attendait
J’étais seule avec le corbillard
J’étais sortie de la chambre ou une pièce mortuaire où tu étais enveloppée avec un linceul comme je l’avais demandé.
Cercueil ouvert
Il m’ fut encore impossible
De ne pas hurler et de ne pas pleurer
Jusqu’à ce que le corbillard me demande :
« Arrêtez-vous s’il vous plaît, vos pleurs sont déchirants »
Allez, venez, il faut y aller »
Je suis montée dans le corbillard assise à côté de ton cercueil.
En arrivant au plus loin du cimetière
Dans l’emplacement que cette France destine au « pauvres »
Mais nous n’étions pas pauvres
Mais la France a voulu me rabaisser !
Elle a triomphé
Les médiocres de l’enseignement
Les directeurs et directrices de la peinture parisienne
Oh ! Mais quelle joie ils doivent se partager !
Une grande fosse ouverte t’attendait
Un monticule de terre fangeuse
Était à côté de cette fosse noire humide et froide
Moi qui te choisissais pour toi le meilleur
Le lit le plus chaud et doux
Les draps le plus blanc et immaculés
La nourriture la plus exquise
Pour que tu ne saches jamais combien m’était difficile
d’arriver à maintenir en vie notre foyer
Je te disais : « Maman, tu ne t’occupes de rien
Ça, c’est mon problème »
Une fois que les fossoyeurs descendirent ton petit cercueil
J’ai su que ma vie était terminée et pour toujours
Mes hurlements déchirèrent l’espace…
J’étais seule…
Tu ne pourrais plus t’approcher pour me consoler
Des petits chagrins de jeune
Le corbillard
S’approche de moi et me dit :
« Madame, ne pleurez plus, s’il vous plaît !
Votre Maman est avec Dieu maintenant. »
Maman
Dieu est avec toi?
Cins années passèrent
J’ai dû te changer de cimetière
Vers un autre décent
Où j’ai acheté une concession « perpétuelle »
Pour nous deux
Mais je n’ai pu payer que pour dix ans
En attendant « des jours meilleurs »
Et j’ai construit deux caveaux
Et j’ai dû acheter
Trois cercueils
Trois exhumations
Et trois inhumations
Le dernier cercueil est sarcophage.
Programmant dès le début
Échapper à la France
Quoi ne veut pas de nous
Mais ni l’argent ni la fuite n’ont pas été possibles
Et les sauvages me menacent découvrir ta tombe
Pour débuter une seconde horreur
Le sacrilège de violation de ta tombe et de ton cercueil
Mais les sauvages assermentés en totale impunité
Parce que je n’ai pas l’argent qui me reste à payer
Et tous se réjouissent
Ils m’observent
Avec une distance parfaite
Pour obtenir
La meilleure perspective
Et m’observer comment je vais faire pour sauver ton cercueil.
Dis Maman
Est-ce que Dieu est avec toi ?
Carmen Florence GAZMURI-CHERNIAK
NADEZHDA
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